Liaisons sociales 8 décembre 2023
Journée internationale des droits des personnes handicapées : FO reste engagée
« La journée internationale des droits des personnes handicapées s’est tenue le 3 décembre », a rappelé FO dans un communiqué de presse diffusé le lendemain, « l’occasion de faire le point sur les initiatives syndicales en faveur des droits et des intérêts des travailleurs handicapés et de mettre en lumière les discriminations sur les lieux de travail ou encore dans l’emploi ».
Ainsi, dans un contexte où « la Confédération syndicale internationale (CSI) alerte sur les conclusions préliminaires du prochain rapport des Nations Unies sur le handicap et le développement », qui indiquent que « le monde est de moins en moins en mesure de pouvoir réaliser les objectifs de développement durable pour les personnes handicapées », affirme continuer « de s’engager au quotidien en faveur des travailleurs handicapés ».
Elle indique ainsi notamment avoir coorganisé, le 30 novembre et le 1er décembre, un séminaire de travail dans le cadre du projet de la Confédération européenne des syndicats (CES) « Les syndicats contre les discriminations », sur la thématique du handicap.
Objectif de ce séminaire : « rappeler le rôle central de la négociation collective et du dialogue social pour lutter contre les discriminations auxquelles font trop souvent face les travailleurs handicapés dans l’emploi et sur les lieux de travail ».
Info Militante 12 décembre 2023

Séminaire FO avec la CES : l’enjeu syndical de la lutte contre les discriminations envers les travailleurs handicapés
Fin novembre, le premier séminaire de la confédération européenne des syndicats organisé avec FO à Paris a invité les syndicats à se saisir de la question des multiples discriminations dont sont victimes les travailleurs handicapés. Et à devenir plus inclusifs pour guider leur action.
Les 30 novembre et 1er décembre, s’est tenu au siège de la confédération à Paris le premier séminaire d’un cycle intitulé « les syndicats contre les discriminations » organisé par la Confédération européenne des syndicats (CES) et FO. Sujet choisi pour inaugurer ce cycle : les discriminations liées au handicap. Entre état des lieux et recueil de pratiques syndicales, une trentaine de syndicalistes venus d’Irlande, des Pays-Bas, d’Italie ou encore de Belgique, ainsi que des spécialistes, ont partagé leurs expériences.
Au programme de ces journées : comment faire évoluer l’action syndicale face aux discriminations que subissent les travailleurs handicapés européens lorsqu’ils cherchent un emploi ? Malgré les lois et autres quotas d’embauche, le problème du chômage reste chronique. Alors que l’Europe compte 80 millions de personnes handicapées, un chiffre conséquent, seulement 51,3 % ont un emploi. Contre 75,6 % pour les salariés sans handicap.
Dans tous les pays, les discriminations demeurent. En France, parmi les 7 000 saisines du Défenseur des droits en 2022, le handicap reste le premier motif de saisine. 80 % des saisines concernent des discriminations liées au maintien en emploi et l’évolution de carrière des salariés handicapés. 20 % concernent l’accès à l’emploi a souligné Fabienne Jégu, conseillère handicap au Défenseur des droits. L’absence d’aménagement du poste de travail pendant la période d’essai, l’affectation à un emploi non adapté à son handicap sont des motifs récurrents. Les préconisations de la médecine du travail pour adapter le poste ne sont pas suivies a-t-elle précisé. Pour y remédier, une des solutions pourrait être un passeport professionnel comportant les aménagements de poste nécessaires, propriété du salarié. C’est un outil que nous proposons aux syndicats, qui peut être inclus dans la négociation d’accords a expliqué Quinn Roache, chargé des questions du handicap au Trades Union Congress (TUC) au Royaume-Uni.
Pour des syndicats plus inclusifs
Alors que le rôle des syndicats est majeur pour faire appliquer les aménagements de poste, les intervenants ont souligné la nécessité de continuer à les sensibiliser au handicap : Il faut continuer à accompagner nos syndicats, à outiller les élus des CSE pour favoriser l’insertion et le maintien en emploi de travailleurs handicapées. En 2023, 1,1 million de personnes en situation de handicap exercent une activité en France. Ça augmente, mais malgré tout, leur taux de chômage reste important. Il faut aussi aider nos militants à prévenir les licenciements pour inaptitude qui ont beaucoup augmenté ces dernières années a souligné Anne Baltazar, conseillère confédérale FO chargée du handicap.
Les syndicats eux-mêmes doivent-ils évoluer pour mieux appréhender ces discriminations ? La stratégie européenne 2021-2030 en matière de handicap pousse les États-membres à promouvoir des syndicats plus inclusifs. Ils doivent s’ouvrir, intégrer en interne davantage de travailleurs handicapés a estimé Beppe de Sario, de la fondation Giuseppe de Vitorrio. Les participants, sondés en direct, ont été unanimes sur ce point. Difficile en effet d’appréhender les discriminations des travailleurs handicapés et leur maintien en emploi sans œuvrer dans le même temps à les intégrer dans le syndicalisme. On sait par exemple que le risque de harcèlement des femmes handicapées est très important. Sept femmes handicapées sur dix y sont potentiellement exposées. Or, on manque de femmes handicapées dans les syndicats et dans les gouvernances du travail a fait remarquer Quinn Roache.
L’âge et le genre, motifs de discriminations
Autre axe du séminaire : les discriminations intersectionnelles. Un sujet complexe. Les discriminations que vivent les travailleurs handicapés sont multiples. Elles tiennent à la fois à l’accès au travail, mais aussi à l’âge et au genre. Il faut renforcer nos connaissances sur ce sujet a souligné Francesca Carrera, de la fondation Giuseppe Di Vittorio.
Cette notion de discrimination intersectionnelle des travailleurs handicapés commence tout juste à émerger dans les politiques européennes, notamment dans le plan de stratégie 2021-2030 pour les droits des personnes handicapées. Pour approfondir ce sujet, deux ateliers ont été organisés, portant sur des types de discriminations spécifiques « le handicap et le genre » et « le handicap et l’âgisme ». Et sans surprise, de l’avis des participants, les jeunes et les salariés handicapés vieillissants sont particulièrement exposés. Mais aussi les femmes. En France, seulement 20 % des femmes handicapées travaillent à temps plein, contre 29 % pour les hommes handicapés a rappelé Pascale Ribes, présidente de l’APF France Handicap. La dimension du genre est donc très importante. Les femmes handicapées ont beaucoup plus de mal à obtenir un temps plein que les hommes. Elles sont confrontées à des difficultés financières plus grandes.
En Europe, les études manquent pour mieux appréhender ces discriminations croisées. La confédération européenne des syndicats, qui suit de près le volet emploi de la stratégie européenne sur le handicap, en a conscience : Nous avons demandé à la commission européenne d’améliorer les statistiques sur l’emploi des personnes handicapées, par genre notamment a indiqué Ignacio Doreste, chargé des questions de santé et de sécurité au travail à la CES. Une base nécessaire pour orienter l’action syndicale. Et mieux protéger ces travailleurs vulnérables.
Liaisons sociales 18 décembre 2023
Les maladies chroniques aggravent le risque d’être exposé à une discrimination dans l’emploi
Une personne sur six atteintes de maladie chronique déclare avoir été victime, au travail, de discrimination en raison de son état de santé et, parmi elles, celles dont la maladie est visible sont trois fois plus exposées à ce risque, selon le 16e baromètre sur la perception des discriminations dans l’emploi de la Défenseure des droits. Rendu public le 14 décembre 2023, celui-ci est spécifiquement consacré cette année aux discriminations concernant les personnes atteintes de maladies chroniques. Claire Hédon y préconise notamment une modification de la définition légale de la discrimination liée au handicap, ainsi que le renforcement des moyens des acteurs de la santé au travail.
La prise en considération des maladies chroniques et la prévention des discriminations qui peuvent y être associées, constituent un « défi majeur de santé au travail », et ce d’autant plus que la part de la population active touchée par ce type d’affection est en augmentation : de 15 % en 2019, elle devrait atteindre 25 % dès 2025 selon l’Anact. Le 16e baromètre sur la perception des discriminations dans l’emploi, présenté par la Défenseure des droits le 14 décembre 2023, ne fait pas mystère des difficultés auxquelles sont confrontés, dans leur emploi, les salariés atteints d’une maladie chronique (cancer, diabète, anxiété chronique, sclérose en plaques). Pour remédier à la persistance des discriminations les concernant, Claire Hédon formule plusieurs recommandations. « Le ministère du Travail les accueille avec la plus grande attention […]. La prévention de la désinsertion professionnelle et le maintien en emploi des salariés sont des priorités », nous a confié l’entourage d’Olivier Dussopt.
Surexposition aux discriminations
Une personne sur six atteintes de maladie chronique a été confrontée à une discrimination ou un harcèlement discriminatoire en raison de son état de santé ou de son handicap. Cette situation s’aggrave lorsque l’état de santé est perceptible par les tiers puisque :
- les personnes ayant une maladie visible ont trois fois plus de risque d’avoir été confrontées à une discrimination ou un harcèlement discriminatoire, par rapport à une maladie invisible ;
- les personnes qui connaissent des limitations dans leurs activités habituelles du fait de leur maladie ont quatre fois plus de risques d’être discriminées que celles qui n’en ont pas.
Ces discriminations ont des conséquences concrètes sur le parcours professionnel des salariés concernés. Par exemple, 40 % des personnes malades dont les problèmes de santé sont connus de leur employeur et de leur supérieur ne bénéficient du soutien et de la compréhension
ni de l’un ni de l’autre. Plus encore, un tiers des personnes atteintes de cancer perdent leur emploi dans les deux ans suivant la déclaration de leur maladie. « Les salariés malades sont davantage exposés dans l’emploi à un risque de stigmatisation », a résumé Claire Hédon le 14 décembre 2023, lors de la présentation du baromètre.
Modification de la définition d’une discrimination liée au handicap
Ce constat n’est pas une fatalité. Afin de favoriser le maintien dans l’emploi des personnes atteintes de maladie chronique, la Défenseure des droits recommande ainsi de « renforcer les dispositions légales en matière de lutte contre les discriminations fondées sur l’état de santé ou le handicap ». En particulier, elle invite à inscrire le non-respect de l’obligation d’aménagement raisonnable du poste de travail dans la définition de la discrimination fondée sur le handicap, prévue par la loi no 2008-496 du 27 mai 2008. « Le non-respect des obligations légales de l’employeur vis-à- vis des salariés atteints d’une maladie chronique reste une tendance forte », regrette Claire Hédon. Le baromètre met en effet en lumière que 19 % des salariés atteints d’une maladie chronique bénéficient d’un aménagement de leur poste, et que 29 % n’en bénéficient pas alors qu’ils en ont besoin.
En parallèle, la Défenseure des droits « souhaite réaffirmer le principe de non-discrimination dans l’accès à l’emploi des personnes atteintes de pathologies chroniques ». Elle insiste notamment sur les travaux en cours du comité interministériel d’évaluation des textes encadrant l’accès au marché du travail des personnes atteintes de maladies chroniques, prévu par la loi no 2021-1575 du 6 décembre 2021. Ces travaux doivent s’achever en avril 2025.
Renforcement des moyens des acteurs de la santé au travail
La Défenseure des droits appelle également à renforcer les moyens dédiés aux acteurs clés de la prévention de la santé au travail et de la lutte contre les discriminations : médecine du travail, représentants du personnel et syndicats, référents handicap, inspection du travail.
« Malgré les avancées en matière de santé au travail, la médecine du travail et l’inspection du travail n’ont toujours pas les moyens suffisants pour mener à bien leurs missions et l’obligation de désigner un référent “handicap” pour toute entreprise de plus de 250 salariés n’est pas systématiquement respectée », ajoute Claire Hédon.
En complément de l’action de ces acteurs, elle appelle également à créer des conditions favorables afin d’encourager l’expression des besoins d’aménagements par les salariés souffrant d’une maladie chronique. Là encore, sans entrer dans le détail d’une éventuelle modification de la législation ou des pratiques en vigueur.
Obligation de formation des recruteurs et politique de prévention
Parmi les outils à disposition des entreprises pour lutter contre les discriminations, se trouve la formation de leurs salariés. En particulier, la Défenseure des droits insiste sur l’importance, pour chaque employeur, de rendre pleinement effective l’obligation de formation des recruteurs et d’y intégrer les enjeux liés aux maladies chroniques et aux discriminations fondées sur l’état de santé et le handicap. Pour rappel, cette obligation de formation a été instituée par la loi no 2017-86 du 27 janvier 2017 dans les entreprises d’au moins 300 salariés, ainsi que dans toutes les entreprises spécialisées dans le recrutement. Selon Claire Hédon, elle devrait faire l’objet, par les pouvoirs publics, d’un suivi et d’une évaluation afin de veiller à son effectivité, et le ministère du Travail devrait mieux la faire connaître, ainsi que ses modalités, à travers divers outils (circulaire, campagne d’information et de sensibilisation, etc.).
Au-delà de la formation des recruteurs, la Défenseure des droits recommande d’encourager les employeurs à mener régulièrement des campagnes internes de sensibilisation et de formation. L’objectif serait de donner aux cadres, aux services des ressources humaines, aux représentants du personnel et à l’ensemble du personnel la capacité d’identifier des situations de discriminations, à la fois pour les prévenir et pour savoir comment y faire face. Selon Claire Hédon, les pouvoirs publics devraient renforcer cette politique de prévention dans les secteurs employant une part importante de salariés non qualifiés (ouvriers, employés), qui sont les plus touchés par les maladies chroniques.
Correction des effets « délétères » de la réforme des pensions d’invalidité
La Défenseure des droits alerte enfin sur les « effets délétères » de la réforme des pensions d’invalidité, issue du décret no 2022-257 du 23 février 2022, à l’égard de certains assurés qui se trouvent, en raison de leur état de santé et de leur handicap, limités dans leurs perspectives d’évolution dans l’emploi, voire empêchés de poursuivre leur activité professionnelle à hauteur de leur capacité de travail. « La Défenseure des droits restera mobilisée afin qu’ils soient corrigés », peut-on lire dans le baromètre.
Pour rappel, FO avait notamment condamné, dans un communiqué du 31 mars 2022, « les nouvelles modalités applicables dans le cadre du cumul pension d’invalidité et revenus d’activité, qui ont provoqué chez des milliers de pensionnés des pertes de revenus considérables ». « L’instauration d’un plafond a eu pour conséquence de réduire ou de supprimer purement et simplement la pension d’invalidité lorsque le cumul entre la pension d’invalidité et les revenus d’activité dépasse le plafond annuel de la sécurité sociale », avait insisté la centrale syndicale.
VERS DE NOUVELLES MESURES CONTRE LES DISCRIMINATIONS ?
L’Assemblée nationale a adopté en première lecture, le 6 décembre 2023, une proposition de loi visant à lutter contre les discriminations par la pratique de tests individuels et statistiques. Ce texte prévoit notamment que si un test statistique laisse supposer l’existence de pratiques discriminatoires au sein d’une entreprise, cette dernière a l’obligation de conclure un accord collectif ou, à défaut, d’établir un plan d’actions, sous peine d’une amende administrative. La proposition de loi, soutenue par le gouvernement, devrait être examinée au Sénat en début d’année 2024.
Liaisons sociales 20 décembre 2023
La loi pour le plein-emploi est publiée au Journal officiel le 19 décembre
[...]
Une série de mesures est dédiée à l’insertion des personnes en situation de handicap
La loi met en oeuvre une série de mesures annoncées dans le cadre de la Conférence nationale du handicap.
Plusieurs dispositions visent à simplifier l’octroi de la RQTH (reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé) et l’accès aux droits qui y sont attachés. Les membres du réseau pour l’emploi devront proposer un accompagnement adapté aux personnes bénéficiant de cette reconnaissance, y compris si elles ne sont pas encore inscrites sur la liste des demandeurs d’emploi. En outre, les personnes ainsi accompagnées bénéficieront d’une orientation de droit vers le milieu ordinaire et ne seront plus systématiquement orientées vers le milieu adapté.
La loi prévoit la mise en place d’un « sac à dos numérique », système d’information chargé de recenser les aménagements dont chaque personne en situation de handicap a pu bénéficier durant sa vie. Elle organise également la portabilité des équipements de compensation du handicap, lorsque leur bénéficiaire change d’entreprise.
Le texte confie, en outre, à l’État la gestion de l’emploi accompagné qui offre un parcours médico-social et un soutien à l’insertion à certains travailleurs handicapés.
L’expérimentation des CDD tremplin par les entreprises adaptées et celle des EATT (entreprises adaptées de travail temporaire), qui arrivaient à terme au 31 décembre 2023, sont pérennisées.
On retiendra encore que la dénomination « Ésat » signifiera désormais « établissements ou services d’accompagnement par le travail », mais surtout les droits de leurs travailleurs se rapprocheront de ceux des salariés de droit commun. Au 1er janvier 2024, ils seront ainsi alignés, notamment en matière de droit syndical, de droit de grève ou encore de frais de transport.
Liaisons sociales 22 décembre 2023
Des stéréotypes résistants pour les personnes en situation de handicap, selon une étude
Depuis 2018, l’Agefiph et l’Ifop mesurent la perception du handicap dans l’emploi : ils ont publié le 20 décembre, les conclusions de la 6e édition de cette enquête. De façon constante depuis 2018, 72 % du grand public et 68 % des salariés estiment « difficile » l’embauche de personnes handicapées. 62 % des recruteurs le pensent également (contre 67 % en 2022) et 67 % d’entre eux perçoivent l’insertion et l’emploi de cette population comme une charge supplémentaire dans l’organisation de l’entreprise ou de l’établissement (70 % en 2023). De plus, les évocations associées au handicap révèlent les stéréotypes forts, en méconnaissant notamment le fait que 80 % des handicaps sont invisibles, le handicap étant essentiellement perçu par le grand public et les salariés sous le prisme du handicap moteur et de l’accessibilité au bâti et aux transports. Mais 52 % des répondants estiment que les personnes en situation de handicap ont contribué à changer leur regard. Si 78 % considèrent que travailler aux côtés d’une personne concernée par un handicap nécessite des aménagements concrets, pour 77 % d’entre eux, c’est aussi l’occasion de mettre en place « de nouvelles manières de faire ».
Dernière mise à jour : 22 décembre 2023